2 - Film publicitaire ROBERT
Pour toutes celles et
ceux (tel que moi) qui ne connaissaient pas ce document, c'est une nouvelle
exceptionnelle, il existe - ou existait -, un film publicitaire
réalisé en 1900 par le père du cinéma, Georges Méliès, sur le thème du
biberon Robert. Si certains doutaient encore de l'avance de la fabrique en
terme de communication, voilà bien la preuve que malgré les critiques que
l'on peut entendre sur les qualités de ce chef d'entreprise, on ne
peut lui enlever cette intelligence commerciale, qui lui faisait utiliser
les techniques les plus modernes pour vendre ses produits... Voyez ce qu'en
disait Méliès lui-même...
L’intérêt de Méliès
pour la publicité ne s’est jamais démenti. Le jeune homme a vingt ans quand
la loi du 29 juillet 1881 libéralise l’affichage. Il est donc contemporain
de cet événement dont on a tendance à sous-estimer l’impact en termes de
représentations (lui préférant l’aspect « liberté de la presse »).
Désormais, l’affichage, qu’il soit commercial ou autre, est un droit. Alain
Weill précise que « les murs des grandes villes sont pris d’assaut et [que]
les emplacements affichables se négocient à prix d’or : en 1884, la ville de
Paris met [ainsi] en adjudication ses murs pignons [soit près de 15 000 m2]
pour une redevance annuelle de 15 000 francs »
Alain Weill, "L’Affiche française", Paris, PUF, 1982, p. 24
Il existe deux sortes
d’affichage : l’affichage en pose libre (sur les murs ou palissades) ; et
l’affichage en conservation (sur des panneaux spécialement prévus pour ça,
avec garantie d’entretien et de conservation). |
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Publicité pour les biberons Robert - Georges Méliès 1900
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La plupart des
affiches observées dans les films de Méliès relèvent de la première
catégorie (la pose libre). Seules exceptions, les colonnes Morris [de
William Morris, peintre, décorateur et publiciste anglais], édicules
très présents dans ses films, au contraire des vespasiennes, également
contemporaines mais soigneusement occultées. Il faut préciser ici que Méliès
s’est très tôt intéressé à la publicité. Dans une conférence donnée en 1932,
il évoque un souvenir marquant :
« Depuis mon
enfance, j’avais toujours vu, au-dessus du théâtre des Variétés, boulevard
Montmartre, un grand écran de publicité lumineuse devant lequel je m’étais
bien souvent arrêté. C’était simplement des tableaux de verre, accompagnés
d’inscriptions que l’on projetait sur cet écran à l’aide de lanternes
Molténi, simple perfectionnement de la vieille lanterne magique de nos
pères.1
Méliès, qui réalisera lui-même de
nombreuses publicités cinématographiques (moutarde Bornibus, corsets
Mystère, Dewar’s Whisky, Bock Orbec, Picon, biberon Robert, etc.),
est un adepte de cette technique de persuasion, comme le seront un peu plus
tard Robert Desnos et Armand Salacrou. Il écrit également en 1932 :
« Quant à la publicité, ce n’est
pas d’aujourd’hui que date l’universelle reconnaissance de sa puissance
formidable. J’avais à peine vingt ans quand je lus en Angleterre cette
formule qui est toujours vraie : « La publicité est aux affaires ce que la
vapeur est aux machines : la grande force propulsive ! » Donc, faites de
la publicité. Ainsi soit-il ! »
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1
- Jacques Malthête, « La vie et l’oeuvre de Georges Méliès, petit précis
spatio-temporel », in Jacques Malthête, Laurent Mannoni (dir.),
"Méliès, magie et cinéma", Paris, Paris Musées, 2002, p. 129
2
- Jacques Malthête, « La vie et l’oeuvre de Georges Méliès, petit précis
spatio-temporel », in Jacques Malthête, Laurent Mannoni (dir.),
"Méliès, magie et cinéma", Paris, Paris Musées, 2002, p. 133
Thierry Lefebvre, « Le Paris de Georges
Méliès », "Sociétés
& Représentations",
1/2004 (n° 17), p. 363-370
www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2004-1-page-363.htm |